R1 : Waterloo ? Non, Eylau !

par

Matthieu Pourquet

publié le

13 janvier 2016

waterloo

Quelques jours avant la bataille de Pont-à-Mousson, j’étais raisonnablement confiant, voire prudemment optimiste. Certes, les informations que nous avions recueillies indiquaient toutes que les Mussipontains seraient sans doute largement supérieurs aux nôtres, mais ne les avions nous pas défaits l’an dernier en N4 alors que le rapport de force nous était également sensiblement défavorable ? Et puis le capitaine Vigneron ne m’avait-il pas promis des renforts ?

Eh bien, le week-end précédant le choc, je dus déchanter : les renforts annoncés, c’était un peu comme Grouchy à Waterloo… Jean me cédait un de ses grognards mais m’en réquisitionnait deux ! Il faut dire pour sa décharge qu’il s’était fait piller par le capitaine Paci parti guerroyer bien au-delà des frontières de la Vandopérie…

abbaye prémontre 1

Bref : j’avais beau compter et recompter sur mes petits doigts boudinés par les fêtes de fin d’année, mon escadron ne comptait, outre son capitaine, que deux membres, soit la moitié de son effectif normal, et peut-être un troisième mais Florian se tâtait. Par bonheur, après quelques épiques tractations dont je vous passe le détail, deux vaillants soldats rejoignirent ma troupe, dont le lieutenant Johann, qui allait connaître son baptême du feu et dont on reparlera. Comme, de plus, Florian avait fini son exploration de lui-même, mon escouade se trouvait au complet à l’avant-veille de l’affrontement.

Bien que renforcés, nous ne nous attendions pas moins à subir un Trafalgar, d’autant plus que Gérard revenait de Londres. Gérard que nous attendions impatiemment au château comme Napoléon attendait naguère Grouchy, toujours lui, et ce n’était pas bon signe. Gérard que mon coup de fil à 13H20 tira du lit. Lit qu’il avait regagné à 10 heures. 10 heures du matin. Rapport qu’il avait conduit toute la nuit pour rentrer de la perfide Albion. Gérard, donc, qui nous rejoindrait directement sur le théâtre des opérations, la magnifique abbaye des Prémontrés, superbe écrin de nos exploits de l’an dernier (que l’on peut lire ici). Enfin s’il ne se rendormait pas.

Baran - de Talancé 2

Comme l’an dernier, la salle est spacieuse, les échiquiers sont en bois, le café gentiment offert est sucré à la demande et l’addition s’annonce salée : Pont-à-Mousson a sorti la grosséquipe, et nous sommes en infériorité sur tous les échiquiers ! Il y a de la revanche dans l’air…

Du haut de ses Elo, 319 points me contemplent… tel est l’écart de niveau entre mon adversaire et moi. Pourtant, je serai mieux dans toute la partie. Du moins, mieux à la pendule… En vérité, consulté, mais rassurez-vous après la fin du combat, l’ami Fritz jugera le duel à peu près équilibré jusqu’au 25ème coup. Au 26ème, je pris même un léger avantage matériel, un pion, et un pion, comme dit le GMI Guy Roux, c’est un pion. Mais près de 10 coups plus tard, mon avantage avait fondu comme Belge au soleil, et les Blancs avaient l’initiative, comme on dit dans les bouquins sérieux : je devais faire face à une offensive massive de pièces lourdes, une dame et une tour, sournoisement introduites dans mon camp. Mais je tenais, jusqu’au moment où je gaffouille. Heureusement, en zeitnot depuis un moment, mon adversaire se trompe d’échec en jouant Da8+ au lieu de Td8+ qui mettait fin à la partie en gagnant ma dame en trois. Après l’échange des dernières pièces d’artillerie, et le sacrifice de mon fou contre deux pions qui ne demandaient qu’à être promus, la finale se révélait difficile à gagner pour le Mussipontain, dont le fou était paralysé par la menace que représentait un de mes pions plus si loin de la terre promise… Pour une fois, dans une finale, je ne me trompais pas de plan et, après la centralisation des rois, mon adversaire, dépité, devait se résoudre à accepter la nullité, bien conscient de m’avoir raté…

Paris et r1 pont à mousson 103

Nullité pas tout à fait méritée, mais pas volée non plus, et qui faisait bien nos affaires à ce moment du match. Car entretemps, Gégé, arrivé pile à l’heure mais l’esprit encore embrumé par le fog londonien, avait interverti deux coups et s’était retrouvé dans la Tamise. Heureusement, le toujours imprévisible Florian avait réédité son exploit de l’an dernier en disposant magistralement d’un adversaire bien mieux classé. Jean T, toujours aussi solide, avait réussi à neutraliser son homologue. Malheureusement, Juliette avait craqué et était tombée au champ d’honneur sans démériter. Après ma partie nulle, nous étions donc menés 2-1. Mais il restait encore un duel.

Et quel duel ! Contre un 1935, Johann, pour son baptême du feu, avait d’abord gagné une pièce, mais qu’il avait dû rendre par la suite. Parvenu en finale, il possédait deux pions, soit un de plus que son adversaire. Et surtout, son fou dominait la cavalerie ennemie et pouvait contrôler la case de promotion du fantassin élu. Un avantage qui allait se révéler décisif… Jouant avec le drapeau et mes nerfs, notre jeune stratège remportait, au bout du suspense, le point nécessaire pour que nous égalisions au score. Un match nul, donc, mais qui aurait presque la saveur de la victoire… Pas Austerlitz, non, disons Eylau… une demi-victoire napoléonienne au nom prédestiné !

 

 

 

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